Vincent Dedienne – Un soir de gala

Deux seuls en scène, deux Molière ! Après S’il se passe quelque chose récompensé en 2017 et un détour au cinéma, Vincent Dedienne revient sur les planches avec une série de personnages drôles et décapants dans Un soir de gala, Molière de l’humour 2022.

Qu’écririez-vous à l’adolescent que vous étiez si vous deviez lui envoyer une carte postale ? C’est sur cette question improbable que le comédien débute son nouveau seul en scène. Il y incarne, sur un ton doux-amer, une galerie de portraits excentriques, reflets de notre époque. Comme Paul, le retraité passionné par les enterrements, ou bien ce journaliste accro à l’actualité. Des personnages tendres et absurdes à travers lesquels il raconte sa nostalgie de l’enfance et du temps qui passe.

Hip Hop Opening

Buffet dressé, lustres en cristal et tenues de soirée exigées, Hip Hop Opening investit une soirée mondaine pour mieux déstructurer ses codes. Retour vers le futur du mouvement hip hop et hommage à sa force plus que jamais festive et subversive. En piste pour la pure joie d’être ensemble et de danser !  

Une fête entre amis, une ambiance un peu guindée. Entre flûtes à champagne et serveurs sapés, l’ennui n’est pas loin de pointer son nez. Rien n’a été oublié, pas même le DJ. Soudain, le hip hop surgit et s’empare des corps. Et les dix danseurs alternent battles et solos, scènes de groupes et instants suspendus dans une apparente désinvolture et une grâce renouvelée. Membres du collectif FAIR-E à la tête du Centre chorégraphique national de Rennes depuis 2019, les chorégraphes Bouside Ait Atmane et Saïdo Lehlouh célèbrent la grammaire disruptive des chants et des danses urbaines. Sur fond sonore de voix, verres et assiettes, la contre-culture affirme sa vivacité et sa créativité aujourd’hui.

LOVETRAIN2020

À destination des années 80, cette néo comédie musicale pour 14 danseurs dessert les tubes lancinants et pop de Tears for Fears. Le train d’Emanuel Gat comporte un accès direct à des références baroques et des contrepoints émotionnels. Un métissage chorégraphique exaltant.

À l’image des élégants costumes dessinés par l’un de ses danseurs, Thomas Bradley, LOVETRAIN2020 est une ode à l’exubérance et à la déconstruction, aux influences diverses et aux possibilités infinies de récit. Dans un dialogue excentrique entre musique et mouvement, lumière et scénographie, le chorégraphe israélien poursuit son travail exigeant de renversement de perspective et de recherche de beauté. Scènes de collectif succèdent à duos et quatuors pour une performance aussi raffinée que généreuse. Sans jamais nier le bonheur immédiat partagé sur le plateau, Emanuel Gat livre une réflexion lyrique sur l’individu et le groupe, en écho à la force utopique et au groove épique des compositions de Tears for Fears.

La Tragédie de Carmen

Adaptation légendaire du Carmen de Bizet par Peter Brook, Jean-Claude Carrière et Marius Constant, La Tragédie de Carmen en tire la quintessence dans une partition forte, interprétée  avec justesse par l’Ensemble Miroirs Étendus. Quand on aime, on ne tue pas.

Dans le répertoire imaginaire des mélomanes, il y a Carmen et La Tragédie de Carmen, version resserrée de l’histoire de l’ensorcelante bohémienne qui, avec quatre chanteurs, deux comédiens et un ensemble instrumental, souligne toute l’intensité du drame. Signée Peter Brook, Jean-Claude Carrière et Marius Constant, cette adaptation de l’opéra de Bizet revient aux racines de la nouvelle de Mérimée. Elle dépouille l’histoire de tout pittoresque pour souligner les relations brûlantes des personnages, entraînant le spectateur «dans une foudroyante et fascinante chevauchée du côté de la mort». La Tragédie de Carmen suscite un tel choc à sa création en 1981 aux Bouffes du Nord que Peter Brook décide d’en faire un film, lui aussi entré dans la légende. Elle est présentée ici dans une magnifique distribution, réunie par le Théâtre Impérial – Opéra de Compiègne, emmenée par la cigarière virtuose Julie Robard-Gendre.

Backbone

Entre pyramides humaines, voltiges et acrobaties, Backbone se moque de la gravité terrestre et exalte la puissance du collectif. ­­­Ce « Cirque du Soleil d’Australie » se passe d’agrès pour exprimer la puissance des corps et leur équilibre fragile.

Gravity and Other Myths invente depuis 10 ans un nouveau cirque dont les soubassements empruntent aux langages de la danse et du théâtre. Dans un chaos soigneusement organisé, dix acrobates s’attrapent et se soulèvent avec confiance et décontraction. Ne vous fiez pas aux apparences, aussi époustouflantes soient-elles, un sens de l’espace et de la lumière maîtrisé soutient la virtuosité des portés. À l’image de la colonne vertébrale, garante de « l’intégrité du corps humain et de la société », seules la force et la communion des artistes circassiens et des musiciens permettent à l’ensemble de s’élever. Au-delà de son déluge acrobatique, Backbone nous questionne sur le vivre ensemble, sur les poids et les limites physiques ou mentales qui nous lestent.

Navy Blue

Entre ballet contemporain, projection de vidéos, emprunt au code cinématographique et musique électro, Navy Blue est la toile de fond d’un poème chorégraphique. Entre l’effroi et l’espoir, une création intense et engagée.

La chorégraphe irlandaise Oona Doherty entraîne dans son sillage scénique des talents aussi éclectiques que pointus, du musicien Jamie XX au vidéaste Nadir Bouassria. Le public grenoblois a pu découvrir son travail viscéral et audacieux avec Hope Hunt lors de La MC2 en fête en juin 2021, repris de manière démultipliée en 2022 dans le programme du Ballet national de Marseille. Pour cette nouvelle création (répétée en partie dans nos murs), la chorégraphe entend mêler, dans une chrysalide de bleu, « danse classique, texte et danse contemporaine comme terrain de jeu d’une violente spirale ».

Via Injabulo

Les chorégraphes européens Amala Dianor et Marco da Silva Ferreira ont accepté l’invitation de la compagnie sud-africaine Via Katlehong. Chacun, à sa manière, s’est inspiré du réservoir d’énergie et de revendication identitaire du collectif urbain pour dessiner les deux pistes de danse de Via Injabulo.

Marco Da Silva Ferreira a recherché un territoire commun. førm Inførms redonne vie à ses squelettes, parfaits représentants osseux du langage chorégraphique de l’isipantsula, où l’on « marche avec les fesses en saillie ». Cette composition fantaisiste et fantomatique, loin d’être macabre, est portée par l’élan vital des Via Katlehong. En 2e partie, Emaphakathini, ce qui signifie entre-deux en zoulou. Cette pièce d’Amala Dianor défriche le patrimoine des danses traditionnelles ou communautaires d’Afrique du Sud comme le gumboots ou le pantsula. Dans ce paysage tournoyant, la puissance et la fragilité de chaque interprète se libèrent des lignes de partage du passé et des tentatives d’assignation du présent.

Pénélope

Versant de son mythique ballet Ulysse, la nouvelle création de Jean-Claude Gallotta éclaire la figure protéiforme de son épouse vertueuse jusqu’à la ruse. Une ode sensuelle et ludique à la stratégie disruptive de la danse.

Il aura fallu 40 ans à Jean-Claude Gallotta pour nous livrer la face contemporaine et féminine de son Ulysse. Au tour de Pénélope d’être démultipliée et confrontée aux prétendants. Dans le clair-obscur du plateau, scènes de groupe et images filmées alternent entre combats et réconciliations. Fidèle à son art du détournement, le chorégraphe grenoblois rend hommage à la danse, à sa vision foncièrement égalitaire des corps et à son pouvoir de décadenasser les esprits.